COMMENT CHOISIR ET CUISINER LA VIANDE ?

Moins mais mieux, voilà comment il faudrait voir les choses en matière de consommation carnée. On a demandé à un pro de nous aider dans nos choix

viandard - Moins mais mieux, voilà comment il faudrait voir les choses en matière de consommation carnée. On a demandé à un pro de nous aider dans nos choix

Comment faire le meilleur choix chez le boucher et sublimer son morceau de viande pour profiter au maximum de la dégustation ? Tout en gardant en tête que ce plaisir gustatif a vocation à se raréfier… En effet, réduire de moitié la consommation actuelle de viande en France, pour tomber à 450 grammes maximum par semaine, permettrait d’atteindre nos objectifs climatiques, affirme une étude du réseau Action Climat et de la Société française de nutrition. Et au-delà même de l’aspect climatique, une consommation trop importante de produits carnés, à commencer par la viande rouge et les charcuteries, a aussi des effets néfastes sur la santé avec un risque cardiovasculaire augmenté. La limitation de la consommation de viande est donc devenue une priorité pour de nombreux Français et ils sont même de plus en plus nombreux à s’aventurer sur le terrain du végétarisme et du véganisme. Selon un sondage Harris Interactive pour Réseau Action Climat paru en avril 2023, 57 % des personnes interrogées affirment avoir diminué leur consommation de viande dans les dernières années, notamment les femmes et les plus âgés. Les Français se positionnent ainsi majoritairement dans une démarche (au moins intellectuelle et déclarative) de réduction de leur consommation de viande : 39 % des Français estiment que dans les 3 années à venir, ils diminueront leur consommation de viande. Une bonne raison donc de se concentrer sur une viande de meilleure qualité.

On a demandé à Arthur Lecomte, propriétaire depuis 2016 du restaurant spécialisé dans les viandes Bien élevé à Paris de nous donner quelques conseils pour nous aider à apprécier chaque bouchée.

Quels sont les critères de choix pour la viande ?

La couleur est un bon indicateur de la qualité de la viande. Généralement, une viande bien rouge est une viande qui est plus concentrée et contient de bonnes fibres. Cela peut être le signe que la vache a été nourrie avec des aliments de qualité, c’est-à-dire du foin, de la luzerne ou de l’herbe. En revanche, si la viande a une couleur très claire, il y a de bonne chance que cela indique un excès d’eau… Dans ce cas, le goût sera moins au rendez-vous. Le prix est aussi un indicateur. Il me paraît compliqué d’acheter de la viande de qualité avec un prix bas. L’origine aussi peut être un critère, même s’il y a de la très bonne viande d’import d’Argentine par exemple, le bilan carbone du produit sera très mauvais. En réalité, le premier argument de choix, c’est l’intégrité du boucher ! Il n’est pas difficile de maquiller certains défauts donc c’est la confiance que l’on a en son commerçant qui est déterminante.

Les attentes des consommateurs sont-elles en train de changer ?

Oui, les gens sont plus sensibles aux différents profils des races. Ils arrivent davantage à exprimer s’ils aiment une viande plus persillée ou plus musculaire. On constate une « premiumisation » du produit avec une sophistication des goûts. C’est un peu la même évolution qu’avec la bière. Il y a dix ans, on buvait de la blonde et puis basta, maintenant on veut des IPA, des ambrées, des bières locales qui traduisent un terroir…

Comment choisir son morceau de viande en fonction de ses goûts ?

Tout dépend si on préfère les morceaux persillés donc plus gras et plus tendres, ou les morceaux plus maigres avec plus de mâches.

Parmi les morceaux les plus tendres, à griller ou à rôtir, on peut citer : la côte de bœuf, l’entrecôte et le faux-filet. Ce sont des morceaux que l’on fait maturer pour transformer les gras et donner un arrière-goût noisetté.

Du côté des morceaux les plus maigres, donc avec plus de mâche, il y a le filet de bœuf. C’est la partie la plus tendre de la bête, c’est aussi une partie « rare » puisque chaque animal en produit seulement entre 6 et 8 kilos. C’est la partie que l’on utilise pour des plats nobles comme le tournedos ou le Rossini. Il y a aussi le romsteck avec plus de jutosité et plus de mâche encore. Enfin, pour ceux qui aiment les fibres longues avec beaucoup de mâche, on peut conseiller la bavette, l’onglet et la hampe.

Qu’appelle-t-on les morceaux « nobles » ?

Il s’agit des morceaux qui nécessitent le moins de transformations pour être mangés. Les côtes, entrecôtes, les filets et rumstecks sont considérés comme nobles. A l’inverse, il y a des parties comme le paleron, la joue ou la poitrine qui nécessitent d’être mijotées longtemps pour atteindre une certaine tendreté. Ce sont des morceaux moins chers que l’on utilise dans des plats populaires et familiaux comme le Pot-au-feu ou le Bœuf bourguignon par exemple. Ce sont aussi ces morceaux qui sont souvent utilisés pour les steaks hachés.

A quoi ça sert de faire maturer une viande ?

La maturation est un processus naturel de transformation des gras. L’idée est de laisser reposer et rassir la viande sur son os afin de l’attendrir et de lui donner davantage de goût. En effet, en se dégradant, le collagène qui entoure l’os va s’infiltrer dans les fibres et attendrir la chair. En même temps, la viande perd son eau, les fibres se resserrent et les saveurs se concentrent. Généralement on fait maturer la viande entre 4 et 5 semaines dans une chambre de maturation dans des conditions très précises pour éviter une contamination bactérienne : la température est comprise entre 0 et 3, le taux d’humidité est compris entre 50 et 60 % et la viande doit être sur l’os et couvert d’une couche de gras pour se protéger.

Des conseils pour sublimer sa viande au moment de la cuisiner ?

Je conseille toujours de sortir la viande du frigo un peu avant de la cuisiner, même une heure avant si c’est une grosse pièce comme une côte de bœuf. Cela permet de détendre les fibres. Ensuite, vous pouvez saler la viande crue afin de mieux l’imprégner.

Pour la cuisson, je recommande de cuire la pièce presque jusqu’au bout mais de la retirer du feu pendant 5 à 10 minutes pour la laisser reposer puis de terminer la cuisson pendant 3 à 4 minutes. Cela permet d’obtenir une viande plus tendre mais servie bien chaude, notamment pour les cuissons au barbecue ou à la poêle.

Pour donner du goût on peut s’essayer aux marinades, notamment sur les morceaux à griller comme la bavette. On laisse reposer la viande dans un mélange huile d’olive, jus de citron, coriandre et on la saisit en tataki (en conservant le cœur presque cru), c’est un délice !

On peut aussi intercaler des branches de romarin ou de thym entre les morceaux, on encore insérer des morceaux de bois comme le genévrier dans une cocotte pour parfumer la viande. Toutes les idées sont les bienvenues !

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